Tanaquil Le Clercq

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Tanaquil Le Clercq
Tanaquil Le Clercq pour Casse-noisette (1954).
Biographie
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Formation
Activité
Père
Jacques Le Clercq (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Conjoint
George Balanchine (de à )Voir et modifier les données sur Wikidata

Tanaquil Le Clercq est une danseuse de ballet et écrivaine franco-américaine, née le dans le 16e arrondissement de Paris et morte le à Manhattan.

Membre fondatrice du New York City Ballet, considérée comme l'une des plus brillantes danseuses de ballet américaines dès le début des années 1950, muse de George Balanchine, elle voit sa carrière stoppée en 1956 par la poliomyélite, maladie qui provoque la paralysie de ses jambes.

Elle renoue ensuite avec la danse et publie deux livres dans les années 1960, Mourka: The Autobiography of a Cat et The Ballet Cook Book, avant d'enseigner au Dance Theatre of Harlem et au New York City Ballet.

Biographie[modifier | modifier le code]

Muse de George Balanchine[modifier | modifier le code]

Tanaquil Le Clercq, prénommée en référence à une reine légendaire et surnommée Tanny par son entourage[1], nait à Paris d'une mère américaine, Edith Whittemore, et d'un père français, Jacques Le Clercq, écrivain et poète. La famille s'installe à New York quand elle a trois ans[2].

Elle suit des cours particuliers de danse dès l'année suivante et entre à la School of American Ballet après une audition en 1941, école où elle a pour professeur George Balanchine[2]. Elle danse sous sa direction dès 1945, dans deux ballets donnés par la School of American Ballet. L'année suivante, il la dirige dans Resurgence, une courte chorégraphie créée pour l'association caritative March of Dimes, dans laquelle elle interprète une jeune danseuse menacée par la poliomyélite, personnifiée et jouée par Balanchine lui-même[3].

Toujours en 1946, elle commence à 17 ans sa carrière professionnelle comme soliste sans avoir été membre de corps de ballet, créant le rôle de Choleric dans The Four Temperaments[4] pour la première représentation de The Ballet Society, nouvelle compagnie de Balanchine[5]. Elle y est décrite par le New Yorker comme une « déesse en colère »[6].

Portrait de Tanaquil Le Clercq (photographie noir et blanc datant de 1950).
Tanaquil Le Clercq en 1950.

En 1948, lorsque The Ballet Society devient le New York City Ballet[7], elle en est principal dancer[8]. Elle est considérée comme la plus importante muse du chorégraphe russe[2] aux yeux duquel elle incarne l'archétype de la ballerine[3]. Ils se marient en 1952[2].

Sa façon de danser, davantage européenne qu'américaine, sa grâce naturelle ainsi que son expressivité la font particulièrement remarquer[3]. Sur scène, elle impressionne également par « son charisme incandescent et son charme irrésistible », s'investissant sans retenue dans chaque rôle[1]. Ses caractéristiques physiques, en particulier ses longues jambes[3], sont une source d'inspiration pour les chorégraphes pour lesquels elle travaille[9].

Victime de la poliomyélite[modifier | modifier le code]

La carrière de danseuse de Tanaquil Le Clercq est brisée par la poliomyélite qui se manifeste soudainement à Copenhague lors d'une tournée européenne à l'automne 1956. Paralysée jusqu'à la taille, elle doit être placée dans un poumon d'acier pour pouvoir respirer[3],[4]. Selon les souvenirs de Shaun O'Brien, un ancien danseur du NYCB, sur lesquels s'appuie Varley O'Connor dans son roman The Master's Muse (2012), elle aurait contracté cette maladie à Venise, en gouttant l'eau d'un canal pour savoir si elle était salée lors d'une promenade nocturne sur une gondole avec d'autres danseurs, après une question de l'un d'entre eux[10]. Durant plus d'un an, Balanchine se met en congé du New York City Ballet et travaille chaque jour avec elle pour qu'elle retrouve l'usage de ses jambes, en vain[10].

Sortie de l'hôpital en 1958, elle est découragée, ne prononçant plus le mot ballet pendant plusieurs mois. Balanchine se montre alors particulièrement attentionné, s'absentant le moins possible de leur domicile[11], y organisant des dîners avec des amis proches[3],[n 1]. Selon Varley O'Connor, il se sent responsable de la paralysie de son épouse : il ne vérifie pas qu'elle est vaccinée contre la poliomyélite avant leur départ en Europe alors qu'il est en charge de la troupe, et qu'ils sont en train de se séparer en raison de ses propres infidélités[n 2]. Elle même se rapprochait depuis quelques mois de Jerome Robbins, l'adjoint de Balanchine. Durant l'année où elle est hospitalisée, au Danemark puis aux États-Unis, Robbins lui écrit quotidiennement[10].

Écrivaine et professeure de danse[modifier | modifier le code]

Tanaquil Le Clercq se réconcilie progressivement avec la danse. En 1962, elle reçoit à son domicile pour la conseiller la jeune Patricia McBride qui reprend le rôle qu'elle avait créé dans La Valse[12]. Elle écrit ensuite deux livres en rapport avec son ancienne activité professionnelle : Mourka: The Autobiography of a Cat (1964) et The Ballet Cook Book (1967).

Le premier évoque le chat du couple que George Balanchine entraîne à danser et qui se retrouve seul dans leur appartement lorsqu'il s'absente[11]. Bien qu'il soit possible d'établir une comparaison entre Mourka et Tanaquil Le Clercq, celle-ci opte pour un ton léger[11]. L'ouvrage est illustré avec des photographies de Martha Swope qui sont adaptées pour les enfants, mais les textes ludiques de Tanaquil Le Clercq sont davantage destinés aux adultes par les inside jokes et jeux de mots qu'elle y glisse[11].

Image externe
Photographie de Martha Swope utilisée pour la couverture de Mourka: The Autobiography of a Cat

The Ballet Cook Book compile des recettes appréciées par des danseurs célèbres, et des anecdotes sur leur vie[13]. La sortie du livre, qui est un grand succès, est accompagnée d'une séance de dédicace au Bloomingdale's de New York lors de laquelle les danseurs du New York City Ballet Jacques d’Amboise, Allegra Kent et Melissa Hayden préparent l'une des recettes du livre pour l'assistance[14].

Dans ce livre, elle fait preuve d'un humour « pétillant »[14]. Elle commence ainsi une recette : « Soufflés fall and so do dancers, and both survive: The main thing is to forget it » (littéralement : « Les soufflés tombent et les danseurs aussi, et les deux survivent : le principal est d'oublier cela »), faisant référence à une chute humiliante qu'elle a vécue lors d'une représentation au Constitution Hall de Washington[13]. Elle est également photographe portraitiste amatrice et verbicruciste, le New York Times publiant plusieurs de ses grilles[2].

George Balanchine demande le divorce en 1969, dans l'espoir vain d'épouser une jeune danseuse du New York City Ballet, Suzanne Farrell, alors que Tanaquil Leclercq et lui ont pris depuis longtemps des chemins différents[10]. Elle enseigne au Dance Theatre of Harlem de 1974 à 1982[2], y guidant ses étudiants en utilisant ses mains et bras comme des pieds et des jambes[15]. Elle intervient aussi au New York City Ballet, pour apprendre à ses élèves les rôles créés par elle[3].

Fin de vie et hommages[modifier | modifier le code]

A la fin de la vie de George Balanchine, Tanaquil Le Clercq et lui se sont réconciliés[10], et lorsqu'il meurt en 1983, il lui transmet la majeure partie des droits et revenus à venir sur ses ballets[2]. En 1998, Tanaquil Le Clercq est honorée par le New York City Ballet comme membre fondatrice à l'occasion des cinquante ans de la compagnie. Elle meurt d'une pneumonie le 31 décembre 2000 à l'âge de 71 ans[3], quarante-huit ans jour pour jour après son mariage avec Balanchine[2].

La cinéaste américaine Nancy Buirski réalise en 2013 un documentaire sur Tanaquil Le Clercq, Afternoon of a Faun, retraçant son destin tragique de danseuse et mettant en avant le triangle romantique qu'elle forme en 1956 avec George Balanchine et Jerome Robbins[16]. En 2017, un hommage de deux jours est organisé au Musée Guggengheim de New York pour les cinquante ans de la publication de The Ballet Cook Book, incluant des conférences et des représentations d'extraits de ballets créés avec Tanaquil Le Clercq[14], tandis que le restaurant du musée propose des recettes du livre[17].

Interprétations les plus marquantes[modifier | modifier le code]

Photographie (pose en studio) de Tanaquil Le Clerc et Francisco Moncion à l'occasion d'Afternoon of a Faun, 1953.
Tanaquil Le Clercq et Francisco Moncion à l'occasion d'Afternoon of a Faun, 1953.

Durant les dix années de sa carrière professionnelle, Tanaquil Le Clercq crée trente-deux rôles[4].

Pour George Balanchine[modifier | modifier le code]

La Valse est retiré du répertoire du New York City Ballet de 1956 à 1962, quand Tanaquil Leclercq conseille Patricia McBride qui reprend son rôle de jeune femme séduite par la Mort[18].

Pour Jerome Robbins[modifier | modifier le code]

Le solo qu'elle interprète en tant que soulful music lover est supprimé de The Concert par Jerome Robbins après la paralysie de Tanaquil Le Clercq[4] tant il est lié à sa personnalité[8].

Pour d'autres chorégraphes[modifier | modifier le code]

Publications[modifier | modifier le code]

  • (en) Tanaquil Le Clercq, Mourka: The Autobiography of a Cat, New York, Stein and Day, .
  • (en) Tanaquil Le Clercq, The Ballet Cook Book, New York, Stein and Day, , 424 p.

Pour aller plus loin[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) Varley O'Connor, The Master's muse - A novel, New York, Scribner, , 272 p. (ISBN 978-1451657753)
  • (en) Orel Protopopescu, Dancing past the light - The life of Tanaquil Le Clercq, University Press of Florida, , 384 p. (ISBN 978-0813069029)

Documentaires[modifier | modifier le code]

  • Dancing for Mr. B: Six Balanchine Ballerinas (1989), d'Anne Belle et Deborah Dickson[19]
  • Afternoon of a Faun: Tanaquil Le Clercq (2013), de Nancy Buirski[20]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Le magazine Life publie en décembre 1958 un reportage illustrant cela (voir Liens externes) .
  2. George Balanchine n'était d'ailleurs pas présent lors de la promenade nocturne en gondole à Venise lors de laquelle Tanaquil Le Clercq aurait contracté la poliomyélite.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b (en-US) Holly Brubach, « Dancing Around the Truth », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  2. a b c d e f g h i et j (en-US) Lewis Segal, « Tanaquil Le Clercq; Polio Ended Dancing Career of New York City Ballet Star », sur Los Angeles Times, (consulté le )
  3. a b c d e f g h i et j (en-GB) « Tanaquil Le Clercq », The Guardian,‎ (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  4. a b c et d (en) Nancy Buirski, « The Tragic Downfall of Tanaquil Le Clercq, Ballet’s Greatest Muse », The Daily Beast,‎ (lire en ligne, consulté le )
  5. Lincoln Kirstein, Spellbound Child (programme de la Ballet Society), 1947.
  6. (en) Deborah Bull et Luke Jennings, The Faber Pocket Guide to Ballet, Faber & Faber, , 288 p. (ISBN 978-0-385-11381-6)
  7. « » The New York City Ballet », sur www.landmarkwest.org (consulté le )
  8. a et b Philippe Le Moal (dir.), Dictionnaire de la danse, Paris, Larousse, , 830 p. (ISBN 978-2035113184), p. 129
  9. (en) Nancy Buirski, Tanaquil Le Clercq - Afternoon of a Faun, (lire en ligne)
  10. a b c d et e (en) Joel Lobenthal, « Muse of many faces: Ballerina Tanaquil Le Clercq’s life and times, before and after Balanchine, remembered (and, now, novelized) », Politico,‎ (lire en ligne)
  11. a b c et d (en) « George Balanchine's Dancing Cat », sur The New York Public Library (consulté le )
  12. (en-US) Gia Kourlas, « At City Ballet, Learning From Dancers Who Learned From Balanchine », The New York Times,‎ (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consulté le )
  13. a et b (en) Trina Mannino, « How a 1960s Cookbook Became a Window Into the Secret Lives of Ballet Icons », sur Atlas Obscura, (consulté le )
  14. a b et c (en-US) Courtney Escoyne, « Cooking with "Tanny" Le Clercq: Works & Process Celebrates The Ballet Cook Book », sur Dance Magazine, (consulté le )
  15. (en) Wendy Perron, « Living with AIDS : six dancers share their stories », sur www.thefreelibrary.com (consulté le )
  16. (en) Ronnie Scheib, « Film Review: ‘Afternoon of a Faun: Tanaquil Le Clercq’ », Variety,‎ (lire en ligne)
  17. (en) BWW News Desk, « Works & Process at the Guggenheim Presents Tanaquil Le Clercq's 'The Ballet Cook Book' », sur BroadwayWorld.com (consulté le )
  18. Bernard Taper, Balanchine:A Biography, University of California Press, , 439 p. (ISBN 978-0-520-06059-3)
  19. (en) « Dancing for Mr. B: Six Balanchine Ballerinas (1989) », sur Internet Movie Database (consulté le ).
  20. (en) « Afternoon of a Faun: Tanaquil Le Clercq », sur Internet Movie Database